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NOUVEAU DEBARQUEMENT AMERICAIN MASSIF A KISMAYO, Samedi 27 mars 1993


En dépêchant à Kismayo plus de 2.000 Marines à bord d'un groupe naval, le commandement américain de la Force multinationale (Unitaf) veut étouffer toute velléité de reprise des combats entre clans dans ce port, principal point de tension en Somalie. Ces hommes viennent renforcer les quelque 850 militaires belges déployés dans la cité portuaire du sud de la Somalie.

Le débarquement des véhicules amphibies et du matériel logistique a commencé vendredi à Kismayo, où la situation était «très calme», selon le bureau d'information de l'Unitaf. Au total, quelque 2.200 Marines ont été acheminés par un groupe de quatre unités, emmené par l'un des plus sophistiqués navires d'assaut et de débarquement, l'«USS Wasp», avec à son bord notamment six chasseurs AV-8B «Harrier» à décollage vertical. Des chasseurs et des hélicoptères américains ont également survolé, vendredi, la ville.

MESSAGE MUSCLÉ À OMAR JESS

Cette nouvelle démonstration de force constitue un «message» au colonel Omar Jess, chef de guerre qui préparerait une reconquête de la ville (160.000 habitants). Des mouvements de ses miliciens ont été repérés au nord de Kismayo par les Américains, et les troupes belges ont établi des barrages de contrôle autour de la ville, afin de tenter de créer une zone démilitarisée.

Il y a dix jours, le colonel Jess avait été chassé de la ville par le général Mohamed Saïd Hersi, dit «Morgan», et avait dû se replier avec une cinquantaine de miliciens, 40 km plus au nord, en direction de Djilib. Ces affrontements avaient contraint les Américains à dépêcher une «Force de réaction rapide» de 500 Marines qui s'était retirée, il y a quatre jours, laissant seuls quelque 850 soldats belges, seulement équipés de blindés légers.

 
Cette fois, les Américains sont revenus en force, avec des moyens d'attaque plus importants. Ils ont inondé Kismayo et sa région de 200.000 tracts en somali. Avec un avertissement: les groupes armés, dans Kismayo, ou faisant mouvement vers la ville, «seront traités de manière adéquate». L'ampleur de la réaction américaine s'explique par l'enjeu que représente Kismayo, «abcès de fixation» des rivalités claniques, et les risques de déstabilisation du pays.

Le colonel Jess, qui avait pris la ville en mai 1992, est l'allié du principal chef de guerre, le général Mohamed Farah Aïdid. L'homme fort de la capitale avait accusé l'Unitaf d'avoir permis à Morgan d'infiltrer ses combattants dans Kismayo, il y a un mois. En représailles, il avait lancé plusieurs centaines de ses partisans armés contre les symboles de la présence étrangère à Mogadiscio.

Dans cette ville, quatre Somaliens, dont trois enfants, ont été blessés par balles par des soldats américains, vendredi, selon le porte-parole adjoint de la Force multinationale sous commandement américain. Une fillette de 12 ans a été blessée à la jambe et deux enfants de 13 ans ont été atteints aux jambes et à l'estomac.

MISSION PROLONGÉE POUR LE «ZINNIA»
 
Par ailleurs à Bruxelles, le Conseil des ministres a marqué son accord sur la proposition de prolonger pour une durée indéterminée la mission du navire de commandement et de soutien logistique «Zinnia» qui participe à l'opération humanitaire en Somalie. Le «Zinnia» restera sur place jusqu'à ce que d'autres troupes des Nations unies reprennent les missions de celui-ci, dit un communiqué diffusé après le Conseil.

Le «Zinnia» a appareillé pour Kismayo le 21 décembre 1992 avec à son bord 75 membres d'équipage. Il est pourvu d'appareils de dessalement d'eau de mer et d'une antenne chirurgicale. Il peut également stocker des denrées alimentaires fraîches et de l'eau potable dans ses soutes.

Pendant ce temps, à Addis-Abeba, la conférence de réconciliation somalienne a été suspendue vendredi et, face à l'intransigeance de certains chefs de faction qui ont refusé de signer le compromis politique établi en commission, on ignorait quand reprendraient les travaux...

(Reuter, AFP.)