Le mandat de l'UNOSOM II : son ambiguïté
Ce qu'il n'avait pu obtenir de Bush, Boutros-Ghali l'obtiendra de l'ONU. Le mandat de l'UNOSOM II incluait le désarmement systématique de toutes les factions, en plus de plusieurs autres tâches qui étaient du ressort du rétablissement des institutions somaliennes.
La principale ambiguïté du mandat de l'UNOSOM II a été clairement énoncée dans le rapport de la CE-ONU. Dans son opuscule intitulé Un agenda pour la paix, Boutros Boutros-Ghali distingue entre divers concepts tels que la diplomatie préventive, le maintien (peace-keeping), le rétablissement (peace-making) et l'imposition de la paix (peace enforcement), et la reconstruction d'un pays (nation building). Le mandat de l'UNOSOM II comportait l'exercice de deux grandes prérogatives, soit le pouvoir d'instaurer un environnement sécuritaire (embargo sur les armes, escortes des convois humanitaires et surtout désarmement des factions) et celui de procéder à la reconstruction des institutions somaliennes. Or, d'après la commission d'enquête de l'ONU, seul le premier pouvoir était de la nature d'une imposition, alors que le second relevait exclusivement d'un pouvoir d'assistance1. " La résolution 814 du Conseil de sécurité invoque le chapitre VII de la Charte des Nations-Unies et confère des pouvoirs d'imposition à l'UNOSOM II. Ce faisant, elle distingue entre deux pouvoirs : le pouvoir de désarmer les milices somali, et le pouvoir d'assister le peuple somalien dans la restauration de la structure politique et des organes (gouvernementaux) de leur pays. L'UNOSOM II avait le pouvoir d'imposer le désarmement en usant de la force militaire d'après le chapitre VII de la Charte, quand la force était considérée comme nécessaire. Mais pour ce qui était du rétablissement de la structure politique du pays et de ses organes gouvernementaux, le rôle de l'UNOSOM II était limité à fournir de l'assistance plutôt qu'à imposer des solutions au peuple somalien2. "
Le constat essentiel de CE-ONU (1994) est donc que UNOSOM II a confondu ces deux pouvoirs et que son action a consisté à tenter d'imposer aux Somaliens une reconstruction prédéterminée de leurs institutions politiques et gouvernementales, instituant ainsi une tutelle politique, que ceux-ci n'accepteront jamais, lui préférant la guerre. Un exemple de ce processus d'imposition de solutions politiques est la déclaration unilatérale de l'UNOSOM II que la loi qui serait appliquée en Somalie, serait le Code pénal somalien de 1962, qui datait d'avant le coup d'Etat militaire de 1969.
Le mandat de l'UNOSOM II : ses fluctuations
L'adoption de la résolution 837 du 6 juin 1993 créait un état de guerre virtuel entre l'UNOSOM II et la SNA, l'United Somali Congress (USC/SNA) étant explicitement mentionné dans la résolution. La résolution 837 fut initialement proposée par le Pakistan, dont vingt-quatre soldats avaient été tués le 5 juin 1993, et elle mentionnait le nom du général Aïdeed. Le nom de ce dernier fut retiré de la résolution à la suite des pressions américaines.