Les tristes images d’une Somalie en proie à une catastrophe mondiale au début des années 90 sont de retour ces deux derniers mois. Des photos d’enfants affaiblis par la malnutrition et de milliers de réfugiés ne laissent planer aucun doute sur la gravité de la sécheresse dans la Corne de l’Afrique. En plus de souffrir de la sécheresse et de la faim, la population subit une guerre civile qui dure depuis 20 ans.
Les conséquences des conflits militaires sont plus graves dans des régions aux conditions climatiques extrêmes, ceci est un fait avéré depuis longtemps. Cependant, un groupe de scientifiques a décidé d’aller plus loin. Leur étude, publiée dans la revue Nature, démontre ce que beaucoup craignaient: les conditions climatiques peuvent engendrer des conflits locaux. Solomon Hsiang, chef du groupe de recherche de l’Institut de la Terre de l’Université de Columbia à New York, le confirme:
Des conflits influencés par le climat"Le climat peut se révéler comme l’ultime facteur décisif dans l’éclosion d’une guerre civile."
Dans la Corne de l’Afrique, la sécheresse actuelle est une conséquence du phénomène La Niña – refroidissement des eaux du Pacifique.
Hsiang et ses collègues ont analysé les variations climatiques de 175 pays et la récurrence des conflits civils entre 1950 et 2004. Ils ont remarqué que les guerres étaient plus fréquentes dans les années où sévissait El Niño, plus chaudes et sèches. Il apparait aussi que leur éclosion se produisait souvent au second semestre, au moment où les conséquences du phénomène climatique se font sentir. C’est le cas notamment de la guerre civile du Soudan, en 1983, après 10 ans d’armistice, des conflits en Haïti, du début de la guerre civile en République Démocratique du Congo, en 1997.
Aujourd’hui, la situation est critique: 750 000 personnes sont menacées de mort dans les 4 prochains mois si elles ne reçoivent pas d’aide humanitaire. L’ONU considère cette crise comme la plus grave des 60 dernières années. Ce n’est pourtant pas un problème nouveau ou inattendu. Scientifiques et météorologistes ont anticipé cette crise depuis des mois. Bien que les cycles de réchauffement et refroidissement des eaux du Pacifique se répètent depuis des milliers d’années, la majorité des pays ne sait pas faire face aux conséquences des périodes de sécheresse. Parmi ces conséquences, la hausse de la violence.
Deux fois plus de conflits quand sévit El Niño
Le livre Late victorian Holo-causts, de Mike Davis, fait le lien entre El Niño et les famines de la fin XIXe siècle. Mais, c’est la première fois que des scientifiques établissent un lien statistique entre le climat et les guerres civiles du monde contemporain. En moyenne, l’apparition d’El Niño double le risque de conflit civil dans les zones tropicales, avec un facteur aggravant pour les pays les plus pauvres. Les pertes de production agricole liée à la sécheresse les affectent plus fortement. Ces pays étant plus dépendants du secteur agricole. Avec une offre alimentaire en baisse, les disputes autour des ressources naturelles s’aggravent.
Dans des pays plus riches et aux institutions politiques plus solide, comme l’Australie ou le Brésil, El Niño ne va pas jusqu’à menacer la paix sociale. Le climat serait alors juste un ultime, mais important facteur d’éclosion d’une guerre.
Il n’est pas possible de comparer directement les conséquences de l’El Niño, phénomène abrupt et cyclique, avec celle du réchauffement de la planète, graduel et permanent. Mais le monde doit être attentif à l’apparition de nouveaux conflits engendrés par la sécheresse et la pénurie alimentaire.
Source: http://www.greenetvert.fr/2012/02/21/du-climat-a-la-faim-de-la-faim-a-la-guerre/46894
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