(BRUXELLES2, exclusif) Tous les Etats membres de l’UE qui avaient posé des réserves parlementaires à l’extension de l’opération anti-piraterie de l’UE (Eunavfor Atalanta) – les ont levé : le Royaume-Uni, la semaine dernière (réserve parlementaire), l’Espagne plus récemment (réserve d’alerte) et l’Allemagne devrait le faire demain. « L’Allemagne devrait lever demain la réserve et sera pleinement impliquée dans l’opération » a précisé Pedro Morenes, le ministre espagnol de la Défense, lors d’un point de presse.
Extension calendaire et géographiqueL’extension de l’opération concerne, à la fois, la durée de l’opération, prolongée jusqu’à décembre 2014, que sa zone géographique, qui d’atteindre les eaux territoriales et intérieures somaliennes (ports, eaux entre la côte et les iles) comme ses côtes (les plages). Ce point devrait, normalement, alors être approuvé sans débat, avec les « points A » vendredi.
Les détails dans le plan d’opération (Oplan)Cette décision fixe un cadre général ; elle ne précise les modalités opératoires pour prévenir les attaques pirates. Les détails du plan « offensif » seront, en effet, fixés dans un plan d’opération qui devrait être approuvé la semaine prochaine par le COPS (Comité politique et de sécurité). Les deux décisions font partie d’un même « paquet » qui a déjà été préparé. Et, normalement, sauf incident de dernière minute, le commandant d’opération disposera dès le début du mois prochain, de nouvelles règles d’engagement et d’action permettant de prévenir certaines attaques pirates.
Problèmes d’effectifs réglés …A noter que l’opération Eunavfor Atalanta a récupéré son niveau minimal d’action. Durant plusieurs mois – décembre à mars – elle a effectivement souffert d’un sous-effectif. Mais actuellement, il y cinq bateaux sur zone (2 Allemands, 2 Espagnols, 1 Français). Et ce chiffre pourrait monter à 9 dans les semaines à venir. « Il y a là un vrai effort consenti par les Etats membres afin de ne pas revivre la situation difficile vécue de décembre à mars ».Une décision qui a pris plus de temps que prévu
La décision a pris un peu plus de temps que prévu. Car il y avait une « réelle volonté de tous les pays impliqués, de garder la cohésion de l’opération » a expliqué un expert du dossier à B2. C’est une des rares opérations où il n’y a pas de caveat (restrictions d’emploi) d’un Etat membre. Et nous faisons tout pour que cela perdure ». Les Etats membres voulaient aussi « absolument avoir la notification du gouvernement somalien au secrétaire général de l’ONU » autorisant l’incursion sur le territoire. Et, en interne, il a fallu … un peu de temps pour que la lettre aux autorités somaliennes passe dans le circuit hiérarchique et soit revêtue de la signature de la Haute représentante. Un diplomate européen l’avoue pudiquement : « cela prend du temps ».
Dernière interrogation allemandeSelon d’autres sources, l’Allemagne n’a pas formellement mis en place une réserve, mais il reste tout de même une « interrogation allemande ». Une discussion est engagée en Allemagne au plan politique entre plusieurs partis (Verts et Libéraux notamment). Mais les diplomates allemands à Bruxelles ont assuré leurs homologues européens qu’ils n’entendaient pas bloquer la décision. Maintenant, « tout est possible – assure un diplomate européen – « un Etat peut toujours demander une nouvelle discussion ». D’où une certaine confusion des esprits et des informations qui circulait encore aujourd’hui selon les sources interrogées.De fait, selon un haut diplomate européen, consulté par B2, les interrogations semblent être partagées. Le gouvernement a l’obligation de venir apporter toutes les informations voulues à ses parlementaires, au Bundestag notamment. Les militaires européens redoutent que trop d’informations soient ainsi communiquées. Le secrétaire d’Etat allemand à la défense, G. Schmitt, a ainsi dû faire oeuvre pédagogique et rassurer ses homologues européens qu’il ne divulguerait pas de secret opérationnel. « Chacun a ainsi pu être rassuré ».
Visite du « EU commander » en Allemagne et en EspagneLe contre-amiral Potts, qui commande l’opération européenne Atalanta, devrait d’ailleurs aller en Espagne et en Allemagne – deux des pays les plus réticents pour l’opération – pour expliquer les limites de cette extension et répondre à toutes les questions qui peuvent encore avoir cours dans ces pays.Une action préparée de longue haleine
On a beaucoup glosé sur cette intervention à terre. Et il importe de bien préciser ce qui est concerné dans ce mode plus offensif. Pour ceux qui ont suivi (ou ceux qui n’ont pas suivi) toute l’histoire de la lutte anti-piraterie menée par l’Union européenne, cette discussion sur des modes plus offensifs n’est pas nouvelle.L’action anti-piraterie devient plus robuste en merLe précédent chef d’opération, Howes, avait proposé aux ministres plusieurs options permettant de passer à une action plus déterminée contre les pirates. Un débat similaire avait d’ailleurs eu lieu sur la place Schuman (Union européenne) et au boulevard Leopold (OTAN), afin d’avoir une coordination des deux organisations sur le terrain.Ces options avaient été numérotées de 1 à 5. Les options 1, 2, 3 et 5 avaient été adoptées et visaient une action plus robuste en mer : notamment en coupant la retraite des skiffs pirates vers la côte somalienne, ou en supprimant certains de leurs moyens d’action (destruction des moteurs ou des skiffs) ; en neutralisant les bateaux mères ; en retardant autant que possible le retour à la côte des navires pris en otage ; et même en tentant une reprise de force de ces navires (quand tout l’équipage était en sécurité dans la citadelle).Toutes actions qui ont déjà été mises en oeuvre par des navires opérant tant dans les opérations de l’UE que de l’OTAN et qui ont eu un effet certain sur la réduction de la piraterie.
Le refus d’une action à terreMais l’action 4 (intervention à terre) avait suscité de fortes réserves des Etats et avait dû être abandonnée. Personne n’avait envie d’avoir des hommes, même des forces spéciales à terre. Car « aucun Etat membre n’a vraiment envie de s’impliquer militairement en Somalie ». C’est pour cela qu’une option « 4 bis » pourrait-on dire a été remise en chantier. Il ne s’agit là plus d’aller à terre, mais d’utiliser les moyens maritimes pour viser des « plots » logistiques pirates, selon la terminologie opérationnelle, sans mettre une « boot on the ground » selon le jargon militaire consacré.Maintenant, rien n’empêche un Etat membre qui le souhaite d’envoyer ses forces spéciales à terre (NB : comme l’ont fait les Français pour arrêter des pirates). Mais il le fait alors sous sa responsabilité nationale pas sous le pavillon européen « Les Etats peuvent à tout moment quitter leur casquette européenne immédiatement et à tous moments, même pour 10 minutes, puis revenir dans l’opération ».Objectif casser le modèle de la piraterie
Des moyens maritimesLes moyens utilisés seront ceux de l’opération maritime. L’action sera menée à partir des navires ou avec les hélicoptères de bord, ce qui permet une précision plus importante. Il n’y aura ainsi pas d’avion ni de bombardement. L’objectif est d’éviter tout dommage collatéral. C’est une condition impérative posée par le commandant d’opération et que nombre de gouvernements ont posée à cette extension. Ainsi que l’a rappelé Pedro Morenes (le ministre espagnol de la Défense), « nous ne voulons pas de dégâts collatéraux, pas d’atteinte aux personnes. Et les pirates sont aussi des personnes ». Pour nous, « il est également important que les forces engagées dans l’opération ne prennent pas de risques », a-t-il ajouté, prenant ainsi une position précautionneuse très proche de l’Allemagne.
Eviter les dégâts collatérauxCette condition, on est très conscient de son aspect impératif. « Même si on ne peut pas le garantir à 100%, toutes les précautions seront prises pour éviter tout dégât collatéral – précise notre expert – en ayant des reconnaissances et des renseignements préalables ». Il faut aussi voir que ce qui est visé, ce sont les dépôts pirates, quelques barils de fuels, des 4×4 et des skiffs, avec des échelles, disposés sur une plage. Ces dépôts sont parfois gardés mais pas toujours. Le commandant d’opération et le commandant du navire qui mènent les opérations auront tout pouvoir d’arrêter jusqu’au dernier moment une action offensive. Et, de préférence, un contact visuel avec l’objectif visé devrait pouvoir être conservé, a précisé un militaire à B2.
Risque de confusion avec des pêcheurs écartéLe risque de les confondre avec des dépôts « d’honnêtes pêcheurs » pourrait exister – en théorie -. Mais, en fait, un certain nombre d’indices (les 4×4, les échelles, le nombre de futs d’essence, la non présence de filets de pêche – permettent bien de faire la distinction entre un « plot » pirates et un stocke de pêcheurs. Et le mythe du pêcheur pirate qui tantôt pêche, tantôt pirate, est « bien fini ». « Nous avons affaire à des équipes organisées, professionnelles et structurées. C’est un business économique bien encadré ». Dans les faits, les pêcheurs sont souvent localisés dans des villages ; alors que les dépôts pirates se situent plutôt en dehors des zones habitées.
Les « plots » pirates bien repérés« Nous connaissons parfaitement les bases pirates, où elles sont installées », ce qui réduit la marge d’erreur, a précisé publiquement le ministre espagnol de la Défense. Combien de bases y-a-t-il ? Un journaliste espagnol cite un chiffre précis : 19 bases. Nous avons cherché à vérifier ce chiffre. Personne ne le confirme officiellement. Mais il est un fait, les bases ont été repérées et semblent parfaitement connues des militaires. « C’est un secret opérationnel » nous a confié, à la sortie de la réunion, un responsable européen au fait du dossier.Car effectivement, depuis plusieurs années, les avions de patrouille maritime déployés sur zone (de l’OTAN comme de l’UE), les bateaux qui longent et remontent régulièrement les côtes somaliennes, ainsi que les « autres » informations ont permis de tracer et connaître les différents emplacements pirates, qu’il s’agisse de dépôts logistiques, des « ports » où sont retenus les bateaux pris en otage, ainsi que les différentes sorties vers le large. Quand un Falcon 50 français est basé à Djibouti, comme un P3 Orion espagnol ou allemand, ce n’est « pas pour compter les bancs de dauphins » avait précisé il y a quelques jours un militaire que nous avions interrogé.
Désorganiser les piratesC’est l’objectif principal de l’opération. « Le but est de casser le modèle d’organisation des pirates. Cela casse le sentiment d’impunité des pirates, ca désorganise leur structure logistique ». Avant même d’avoir tiré un premier coup de feu, cet objectif pourrait être atteint. Connaissant la volonté européenne – et les nouveaux moyens donnés aux militaires – les pirates pourraient moins souvent considérer les plages et côtes somaliennes comme un endroit sûr. Ils pourraient ainsi être obligés de déménager les campements, par exemple vers l’intérieur (NB : où il y a d’autres risques pour les pirates : les autres clans, les Al Shabaab, les forces armées…) ou de mettre plus de gardes sur leurs campements. « Si on arrive à mettre un grain de sable dans les pirates, nous avons déjà gagné un point. » explique notre expert.
Les moyens utilisés seront ceux de l’opération maritime. L’action sera menée à partir des navires ou avec les hélicoptères de bord, ce qui permet une précision plus importante. Il n’y aura ainsi pas d’avion ni de bombardement. L’objectif est d’éviter tout dommage collatéral. C’est une condition impérative posée par le commandant d’opération et que nombre de gouvernements ont posée à cette extension. Ainsi que l’a rappelé Pedro Morenes (le ministre espagnol de la Défense), « nous ne voulons pas de dégâts collatéraux, pas d’atteinte aux personnes. Et les pirates sont aussi des personnes ». Pour nous, « il est également important que les forces engagées dans l’opération ne prennent pas de risques », a-t-il ajouté, prenant ainsi une position précautionneuse très proche de l’Allemagne.
Eviter les dégâts collatéraux
Cette condition, on est très conscient de son aspect impératif. « Même si on ne peut pas le garantir à 100%, toutes les précautions seront prises pour éviter tout dégât collatéral – précise notre expert – en ayant des reconnaissances et des renseignements préalables ». Il faut aussi voir que ce qui est visé, ce sont les dépôts pirates, quelques barils de fuels, des 4×4 et des skiffs, avec des échelles, disposés sur une plage. Ces dépôts sont parfois gardés mais pas toujours. Le commandant d’opération et le commandant du navire qui mènent les opérations auront tout pouvoir d’arrêter jusqu’au dernier moment une action offensive. Et, de préférence, un contact visuel avec l’objectif visé devrait pouvoir être conservé, a précisé un militaire à B2.
Risque de confusion avec des pêcheurs écarté
Le risque de les confondre avec des dépôts « d’honnêtes pêcheurs » pourrait exister – en théorie -. Mais, en fait, un certain nombre d’indices (les 4×4, les échelles, le nombre de futs d’essence, la non présence de filets de pêche – permettent bien de faire la distinction entre un « plot » pirates et un stocke de pêcheurs. Et le mythe du pêcheur pirate qui tantôt pêche, tantôt pirate, est « bien fini ». « Nous avons affaire à des équipes organisées, professionnelles et structurées. C’est un business économique bien encadré ». Dans les faits, les pêcheurs sont souvent localisés dans des villages ; alors que les dépôts pirates se situent plutôt en dehors des zones habitées.
Les « plots » pirates bien repérés
« Nous connaissons parfaitement les bases pirates, où elles sont installées », ce qui réduit la marge d’erreur, a précisé publiquement le ministre espagnol de la Défense. Combien de bases y-a-t-il ? Un journaliste espagnol cite un chiffre précis : 19 bases. Nous avons cherché à vérifier ce chiffre. Personne ne le confirme officiellement. Mais il est un fait, les bases ont été repérées et semblent parfaitement connues des militaires. « C’est un secret opérationnel » nous a confié, à la sortie de la réunion, un responsable européen au fait du dossier.
Car effectivement, depuis plusieurs années, les avions de patrouille maritime déployés sur zone (de l’OTAN comme de l’UE), les bateaux qui longent et remontent régulièrement les côtes somaliennes, ainsi que les « autres » informations ont permis de tracer et connaître les différents emplacements pirates, qu’il s’agisse de dépôts logistiques, des « ports » où sont retenus les bateaux pris en otage, ainsi que les différentes sorties vers le large. Quand un Falcon 50 français est basé à Djibouti, comme un P3 Orion espagnol ou allemand, ce n’est « pas pour compter les bancs de dauphins » avait précisé il y a quelques jours un militaire que nous avions interrogé.
Désorganiser les pirates
C’est l’objectif principal de l’opération. « Le but est de casser le modèle d’organisation des pirates. Cela casse le sentiment d’impunité des pirates, ca désorganise leur structure logistique ». Avant même d’avoir tiré un premier coup de feu, cet objectif pourrait être atteint. Connaissant la volonté européenne – et les nouveaux moyens donnés aux militaires – les pirates pourraient moins souvent considérer les plages et côtes somaliennes comme un endroit sûr. Ils pourraient ainsi être obligés de déménager les campements, par exemple vers l’intérieur (NB : où il y a d’autres risques pour les pirates : les autres clans, les Al Shabaab, les forces armées…) ou de mettre plus de gardes sur leurs campements. « Si on arrive à mettre un grain de sable dans les pirates, nous avons déjà gagné un point. » explique notre expert.
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